Focus sur une communauté

Agen : une Église qui ne peut se passer des autres...

05 mars 2019

Au cours des mois à venir, le journal Ensemble vous propose de faire mieux connaissance avec les différentes communautés de notre région. Après Talence, ce mois-ci, rencontre avec la communauté d’Agen.

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J’étais étranger...

Depuis quelques années, une « vague d’immigration » est venue renouveler l’assistance. Des Agenais en recherche, des étudiants de passage, des travailleurs venus d’autres régions et –surtout– des frères et sœurs venus de beaucoup plus loin. En septembre 2016, une rencontre permet à ces nouveaux paroissiens, majoritairement africains ou malgaches, d’évoquer leur expérience et d’interroger notre vie d’Église. Pour eux, le dépaysement le plus fort fut la découverte de notre culte réformé, de sa liturgie, de ses cantiques ; ils étaient habitués à plus de solennité au moment de l’offrande ou de la Cène, voire à plus de déférence envers le pasteur ! Ils s’étonnent aussi qu’il n’y ait pas toujours beaucoup de paroissiens aux bénédictions de mariages, aux services funèbres, au chevet des malades et isolés, prenant conscience que nos rythmes et choix de vie, notamment en milieu urbain, ne facilitent pas la vie communautaire. Une sœur africaine souligne que les sujets de prédication révèlent la différence de nos arrière-plans culturels. Elle comprend mieux le commentaire du texte du jour dans Parole Pour Tous quand il est signé d’un pasteur qui vient de son continent. L. résume la réaction des français présents à la réunion : « je n’avais pas mesuré le choc que notre façon de vivre le culte vous a imposé ! C’est vous qui avez dû faire du chemin pour nous rejoindre... Nous avons de la chance que vous n’ayez pas été découragés et que vous soyez restés ».

...et vous m’avez accueilli

Car ces frères et sœurs sont restés. Tout simplement grâce à l’accueil que l’Église d’Agen leur a réservé. C’est son point fort. J. raconte que la première fois qu’elle est arrivée au culte, parfaite inconnue, une paroissienne l’a invitée à manger. Beaucoup ont été aidés dans leurs démarches administratives, pour régulariser leur séjour, trouver logement, emploi. Le consistoire n’a pas été en reste : une famille ukrainienne réfugiée à Agen a pu occuper provisoirement le presbytère vacant de Castelmoron. G. conclut : « C’est parce qu’on m’a apporté un soutien concret que cette Église est devenue la mienne, la foi sans les œuvres est morte. Aujourd’hui, c’est à notre tour de contribuer ».  Et c’est ce qui s’est passé. Plusieurs sont entrés au Conseil presbytéral, participent activement à la rénovation des locaux, à la catéchèse, à l’animation du culte, à la préparation des repas de fêtes, à l’organisation des visites aux isolés. Certains ont même lancé de nouvelles activités (chorale, groupe de femmes...). Les familles d’origine étrangère représentent 10% des foyers connus et un bon tiers de ceux engagés dans la vie de l’Église. Sans leurs enfants, il n’y aurait plus d’école biblique ou de caté, car ils composent 90% de l’effectif !

 

  

 

 

 

D’autres frontières tombent

Agen est mon quatrième lieu de ministère pastoral. C’est le premier où je vois la confiance fraternelle (qui n’exclut pas la conscience des désaccords) rendre possible l’intercommunion entre Églises protestantes et l’Eglise catholique (avec approbation de l’évêque) lors de la semaine de l’unité. Je n’ai jamais connu ailleurs autant d’actions de témoignage et de service commun, que ce soit avec les catholiques ou avec les évangéliques. Quatre de nos Églises (FPF et/ou CNEF) ont demandé et obtenu, en lien avec la Fédération Protestante, la création d’un poste d’aumônerie au Centre Hospitalier d’Agen en 2013. Cette culture de collaboration entre dénominations protestantes est ancienne. Une radio chrétienne a été lancée à l’initiative de plusieurs Églises dans le département dès 1982 : Radio-Espoir, devenue Espoir-FM. Autre « vénérable institution » : Solidarité Chrétienne, service diaconal (installé dans nos locaux) commun aux Églises adventiste, méthodiste, pentecôtiste et ÉPUdF. Il a pour vocation de distribuer des colis de la banque alimentaire à des foyers d’Agen en difficulté.

Depuis 2010, une nouvelle association a accentué cette dynamique d’unité : Stand’up (« Debout »). Elle a été lancée par de jeunes évangéliques qui auraient trouvé anormal de ne vivre leur foi qu’entre les murs de leur assemblée. Plusieurs membres de l’Église protestante unie y ont trouvé un lieu de service et de présence au monde. L’association veut créer du lien et lutter contre la solitude en organisant des événements artistiques, sportifs, culturels qui permettent aux chrétiens et aux non-chrétiens de se rencontrer et de partager. Stand’up organise chaque année un réveillon de Noël pour 200 à 250 personnes seules, avec le soutien d’un traiteur et de la ville. Et, début 2018, elle a ouvert un café-restaurant solidaire, le Hang’art qui module le prix des repas en fonction des revenus des adhérents et propose régulièrement des ateliers cuisine ou de bricolages divers. Il faut aussi parler de l’association « Bienvenue », créée en 2015, quand le gouvernement français a accepté de donner asile à des Syriens et des Irakiens fuyant l’État islamique, et a demandé pour cela aux Églises catholiques et protestantes de proposer des hébergements. Sept familles ont été accompagnées depuis, plusieurs sont désormais intégrées et autonomes. Enfin, 2017 fut l’occasion d’un temps fort avec l’action « Bouge Ta Ville ». 60 jeunes et moins jeunes, dont plusieurs réformés, ont marqué le 500e anniversaire de la Réforme en participant, sur une semaine, à divers chantiers de nettoyage sous l’égide de la Mairie, en visitant des maisons de retraite... Le tout s’est terminé par un culte rassemblant des centaines de membres des diverses Eglises protestantes et évangéliques d’Agen et Nérac. Tous ces témoignages, cette ouverture, notre communauté luthéro-réformée n’aurait jamais pu les mener à bien ni les entreprendre seule. Le plus beau don à recevoir, c’est d’être unis, au-delà de nos frontières confessionnelles, pour que le monde croie en Christ (Jean 17,21).  

 

 

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La paroisse d'Agen en quelques dates

1560 : Lieu de culte rue Fon Nouvelle

1601 : Premier temple.

1830 : Retour du culte réformé, après 150 ans d’interdiction.

1842 : Un pasteur réside à Agen

1865 : Inauguration du temple actuel, cours Victor Hugo.

1970 : Achat du presbytère, rue Gabriel Griffon

2002 : Accueil d’une famille africaine, réfugiée politique.

2012 : Création d’un poste d’aumônerie hospitalière.

2016 : Rénovation intérieure du temple.

2017 : Inauguration de la Place des Pasteurs de Cabrol.

 

 

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La communauté, quelques chiffres

300 adresses au fichier

45 à 50 personnes au culte ordinaire

15 enfants en âge de catéchèse

12 nationalités

5 prédicateurs

4 repas communautaires annuels

1 étude biblique mensuelle

1 réunion de prière hebdomadaire

1 chorale

2 parcours alpha, depuis 2016

Christophe Desplanque,
pasteur à Agen.

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