Âme Fifties

« Je regarde la France/Avec ses lumières/Ses souffrances/J’vois au bord de l’Eure/Une usine qu’on vend/Et des hommes qui pleurent/Devant » : tout tient dans ces quelques vers d’Un terrain en pente – la position qu’a choisie Alain Souchon, son ambition d’artiste dans son siècle, l’état de son sujet…

Âme fifties, son quatorzième album studio, est tout entier empreint de cette même gravité tendre qui le fait aller de ses propres souvenirs d’enfance à un coup d’œil panoramique sur son époque, de son autobiographie à une parole d’aîné gentiment encourageant. La dernière chanson de l’album, « Ouvert la nuit », enregistrée pour le film éponyme d’Édouard Baer en 2016, semble ramasser toute la trajectoire d’un créateur qui a longtemps douté avant d’admettre quelle est sa place (populaire, influente, immense) dans la mémoire collective de son pays : « On s’aime pas/Mais on s’aime/Ça ira pas/Mais ça ira quand même »…

Alain Souchon n’avait pas publié d’album de chansons nouvelles depuis onze ans et ce retour est celui d’un patriarche bienveillant qui, de sa propre vie, tire un enseignement d’amour, de beauté et de simplicité. Un message qu’il sait habiller de légèreté, comme pour mieux déjouer notre tentation de penser trop de grands mots en l’écoutant.