Méditation

Donner le repos aux fatigués

22 décembre 2016

Comment soulager la douleur de ceux et celles autour de moi qui « craquent » et se trouvent brusquement plantés là au bord de la route ? Quand tout file si vite autour d’eux. Parce que tout doit aller vite et chacun doit être « performant » dans notre monde. « Bienheureux les fêlés » … aurait dit Michel Audiard.

Donner le repos aux fatigués

Comment soulager la douleur de ceux et celles autour de moi qui « craquent » et se trouvent brusquement plantés là au bord de la route ? Quand tout file si vite autour d’eux. Parce que tout doit aller vite et chacun doit être « performant » dans notre monde. « Bienheureux les fêlés » … aurait dit Michel Audiard. N’est-ce pas aux côtés de ceux qui se prennent la violence de notre monde en pleine figure que l’on sent le mieux la nécessité de cette Autre Lumière ? Celle qui ne compte pas, ni aux apparences, ni à la puissance (de travail, financière, intellectuelle, physique…) Mais qui regarde chacun et chacune dans un face à face ressourçant, tendre et encourageant. En vérité, nous sommes tous « fêlés », « fissurés », ce n’est pas une nouveauté de l’époque, c’est un des fondements de l’anthropologie biblique. Nous sommes tous séparés de l’unité de Dieu, par nos fissures d’humains.

Seulement chez certains, la fissure ne se dissimule plus. Elle prend toute la place. Il n’y a plus qu’elle et l’on vit comme le néant de soi-même. Dans la dépression, le « burn-out » comment trouver le chemin de l’espérance ? Jésus dit pourtant : « Vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau, venez à moi et je vous donnerai le repos » (Mt 11, 28). Face à la « sortie de route » de tant et tant parmi nous, comment s’appuyer encore sur cet appel du Christ ? Bien sûr, Lui reste toujours l’ultime soutien, pour au-delà du présent, pour au-delà des apparences, pour au-delà de la vie et de la mort.

L’Église par-delà le croyant

Mais est-on fidèle à cette parole en ne la renvoyant qu’à la responsabilité « individuelle » de se mettre face à Celui qui peut seul nous accueillir ? Ne doit-on pas prendre en compte ces situations où l’on devient incapable de se mettre en face de soi-même ? Parce que ce « soi-même » nous paraît néant. Et qu’alors nous avons besoin d’aide pour nous remettre face au Père. N’est-ce pas alors ici que doit se manifester la promesse de l’Église, de la communauté des disciples ? Je le crois. Quand seul il m’est trop difficile de témoigner en vérité de l’accueil de Dieu devant celui qui est plus bas que terre, l’Église doit jouer son rôle de corps du Christ. Dans un accueil communautaire bienveillant peut se révéler la présence du Seigneur lui-même. Mais pour cela l’Église doit redevenir communauté de vie, de labeur, de prière, de pleurs et de joie. Et pas seulement communauté-d’être-assis-une-heure-sur-un-banc-le-dimanche-au-culte… L’Église doit redevenir cette communauté de « graciés » qui ayant reçu l’accueil de Dieu, le rendent visible par leur mode de vie commun, leur mode de relation. Permettant ainsi à la Parole de s’incarner et de se révéler à celles et ceux prêt à se « désintégrer ». Cela exige certes de prier et célébrer ensemble. Mais aussi de vivre au quotidien, de travailler, sans oublier de fêter ensemble. Afin qu’au milieu du compagnonnage communautaire la Parole du Christ prenne chair pour celui ou celle que plus rien ne porte et lui permette de se relever.

 

Prière

Il y a l’hôpital, les médecins, la maison de repos, les psychologues,

Pour m’aider à remonter du fond du fond.

Mais avant et après, pour retrouver simplement avec Toi le goût de vivre,

Offre moi Seigneur, une maison qui me soit accueillante

Le partage du pain, d’une poignée de main

Et ma simple participation aux tâches quotidiennes

Travail simple où le corps est engagé :

Faire les pluches, couper du bois pour le feu,

Nettoyer les lieux communs pour les rendre propres et beaux

Goûter la force du partage,

Simplement me laisser accueillir,

Pour rien,

Pour moi,

Pour m’entendre dire par les gestes et par le cœur que j’ai du prix

Pour Toi mon Dieu,

Qui nous a tous accueillis dans Ton amour.

Amen.

Partager le pain, redonner vie@wikimedia.org

 

Emmanuel Mourier,
Pasteur, Montagne du Tarn.

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