Un point de vue extérieur?!

Élection présidentielle

01 juin 2017

Si France Inter a Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek, Le Cep peut s’enorgueillir d’avoir aussi son chroniqueur belge. Régulièrement il apporte un regard neuf sur notre politique française.

 

Un jour en discutant avec un gendarme retraité, j’ai lâché sans beaucoup réfléchir : « Mais vous, en France, vous n’êtes pas en démocratie ! ». Bien sûr, je me suis fait rabrouer. Le gendarme retraité réduisait la démocratie aux élections libres. Moi, je voulais surtout parler du système électoral « à la française » qui ne permet pas à des pans entiers de la société d’être représentés au Parlement. Il s’agit du scrutin « majoritaire à deux tours », introduit par le général de Gaulle et de l’élection du président au suffrage universel, avec le même mécanisme, qui modifie profondément la vie démocratique en France.

Tout le monde veut la place
©wiicommons

L’ultra présidentialisation

De plus la constitution a donné énormément de pouvoirs au président. Il n’y a pratiquement qu’aux USA qu’on trouve une présidentialisation aussi poussée. Cela a comme conséquence que le pays est en campagne électorale presque deux ans avant l’échéance. Il ne faut pas s’étonner, dès lors, qu’une majorité d’électeurs ait trouvé la campagne présidentielle ennuyeuse et fastidieuse. On se croirait sur un ring de boxe, où tous les coups sont permis, où les phrases assassines tiennent lieu de programme, où le but est de démolir les propositions de l’adversaire plutôt que de défendre les siennes. Ce scrutin « majoritaire à deux tours » débouche immanquablement sur un affrontement camp contre camp, droite contre gauche. Ceux qui n’ont pas la chance de participer à la finale sont réduits au rôle de spectateurs. Cette spécificité française détonne parmi les autres pays européens, qui n’ont pas de régime présidentiel, mais des élections « à la proportionnelle ».

 Une culture du compromis

Ce mode d’élections permet à tous les courants d’opinion d’être représentés et au pays d’être gouverné par plusieurs partis. Certes, il faut du temps pour se mettre d’accord sur une politique commune. On peut même faire des alliances « contre nature », avoir un exécutif où libéraux et socialistes sont partenaires. Une fois ce gouvernement formé, il représente plus de la moitié du corps électoral alors que, dans le système français, le président n’est l’élu que de 50 % des votants, sans compter les abstentionnistes. Ce mécanisme électoral a pu être judicieux en son temps pour contrer les dérives du parlementarisme, mais aujourd’hui il me semble présenter plus d’inconvénients que d’avantages. Cette idée selon laquelle une élection présidentielle est la rencontre d’un candidat et d’un peuple me paraît aussi dangereuse. La tentation du populisme est grande : pour être élu, il faut caresser le peuple dans le sens du poil, alors que le vrai courage est de privilégier l’intérêt général et de savoir parfois considérer que la minorité a raison. Cela semble valider l’idée que l’on peut se passer des corps intermédiaires et que le président, dans cette « monarchie républicaine », doit concentrer dans ses mains presque tous les pouvoirs.

 Le rôle des syndicats

Dans les autres pays, le dialogue social et la collaboration des régions sont l’assurance que la démocratie fonctionne bien. En France, nous sommes encore dans un pays jacobin, fort centralisé et où le taux de syndicalisation est faible. En Allemagne, par exemple, les syndicats font partie des conseils d’administration de grandes entreprises et beaucoup d’accords sociaux sont souvent mis en œuvre sans que le gouvernement intervienne. De plus, la régionalisation est un atout majeur pour la bonne gouvernance dans beaucoup de pays européens.

Jean-Marie DELCOURT
Saint-Jean-du-Gard

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