Folles idées

Et si les Églises se mettaient au vert ?

01 mai 2018

Le 16 septembre 2017 a été lancé, sous les auspices de la Fédération protestante de France et de la Conférence des évêques de France, un label qui s’adresse à toute communauté voulant s’engager ou renforcer son engagement pour le respect de la Création.

Un label pour l’écologie

Le label Église verte intervient dix ans après le troisième Rassemblement œcuménique européen de Sibiu, qui a préconisé de célébrer un « temps pour la Création » entre le 1er septembre, jour du début de l’année liturgique dans les Églises orthodoxes, et le 4 octobre, jour de la fête de saint François d’Assise dans l’Église catholique, mais aussi jour de la fête des récoltes encore célébrée dans certaines Églises protestantes…   

Il est également lancé deux ans après la mobilisation des chrétiens à l’occasion de la Conférence de Paris sur les changements climatiques (COP 21).

Des fiches d’action

Le processus de labellisation commence par une auto-évaluation de la communauté volontaire de ses actions sur la base d’un éco-diagnostic. L’entrée dans le processus est ainsi amplement facilitée, mais il convient surtout de remarquer que l’obtention d’un label n’est pas conçue comme une fin en soi mais comme un outil d’encouragement. Elle manifeste, en effet, dans un premier temps, que la communauté s’engage dans une démarche de conversion écologique, puis, dans un second temps, qu’elle continue à progresser.
Pour toute précision sur le label, et notamment sur la description de ses niveaux et sur le contenu de l’éco-diagnostic, consulter le site egliseverte.org. Ce dernier, à l’occasion de la toute récente Semaine de l’unité, s’est enrichi de fiches d’action sur les cinq volets de l’éco-diagnostic.
Le démarrage d’un processus Église Verte dans des paroisses de la région Ouest de notre Église pourrait être un bon début pour la création d’un réseau régional, qui pourrait être force d’initiatives et de propositions dans cette thématique de l’écologie encore trop peu prise en compte. Et, personnellement, comme membre de la paroisse d’Orléans, je suis prêt, dans la mesure de mes moyens, à accompagner des paroisses sur leur demande dans ce processus ambitieux.

Philippe Guttinger

Pourquoi ?

• parce que nous croyons que Dieu se révèle par son œuvre, et qu’il l’a confiée aux hommes qui doivent la cultiver et la garder,
• parce que la vie sur terre est une bénédiction et montre l’amour de Dieu, et qu’agir pour la préserver est une façon d’aimer son prochain et d’agir pour la justice,
• parce que la crise écologique nous engage à entendre le cri de la terre qui gémit en travail d’enfantement (Rom 8.22) et à choisir, dans l’espérance, des modes de vie qui préparent l’émergence d’une création nouvelle maintenant et au-delà,
• parce que le peuple de Dieu peut prier et agir pour apporter cet espoir au monde,
• parce que nous avons conscience que c’est en nous convertissant ensemble que nous arriverons à bâtir ce monde plus juste et écologique nécessaire à la survie de l’humanité.


Une idée qui fait son chemin

Les déchets : voilà le thème que l’EPUdF de Cognac a exploré lors d’une journée d’Église ouverte aux autres paroisses du consistoire. Pour l’illustrer, une visite du centre de tri de la Charente a été organisée. Ce sujet peut paraître éloigné des préoccupations d’une Église, et pourtant les déchets font partie du côté obscur de notre humanité que notre espérance chrétienne se doit d’éclairer. Telle était bien la conviction de la trentaine de personnes qui se sont retrouvées à Mornac.

Le centre de tri des déchets appartient à Calitom, le service public de gestion des déchets de la Charente qui collecte la grande majorité des 600 kg que le charentais produit chaque année, les trie, les dirige vers des filières de recyclage et enfouit ce qui n’est pas recyclable. La pédagogie en vue de l’amélioration des pratiques de tri sélectif mais aussi de la diminution de production de déchets fait partie de ses missions et nous avons pu en profiter.

Mieux trier

Un parcours de visite nous a fait suivre le circuit de nos sacs jaunes qui commencent par être déchirés puis les emballages passent dans un crible qui retire les petits éléments non récupérables. Les corps creux (bouteilles) sont ensuite séparés des corps plats (cartons) par rebond puis des trieurs optiques analysent l’opacité des objets et les éjecte par catégorie, les métaux étant retirés par des systèmes magnétiques. Mais ces automatismes sont loin d’être infaillibles et une dizaine d’agents retirent des tapis les déchets égarés.   
L’Église locale de Cognac visite un centre de tri de la Charente à Mornac © Christian Lacroix

Une fois les matériaux séparés par nature, ils sont compactés pour être ensuite évacués vers les entreprises de recyclage, le plus souvent situées en dehors de France.
Si les moyens technologiques et humains mis au service du tri sont impressionnants, si les efforts en matière de respect de l’environnement et du bien-être des agents sont à saluer, il n’en demeure pas moins que cette activité, extrêmement consommatrice en énergie et en argent public, ne parvient encore à atteindre qu’une partie limitée de nos déchets avec des taux de recyclage très variables d’une matière à l’autre. Il nous appartient donc de mieux trier nos déchets mais surtout d’intégrer que le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas.

Et changer nos modes de consommation

Après la visite, nous avons exploré la question des déchets dans la Bible : de Moïse qui recommande aux hébreux d’enfouir leurs excréments(1) à Jésus qui après la multiplication des pains, dit à ses disciples Ramassez les morceaux qui restent, afin que rien ne se perde et avec cela, ils remplirent douze paniers(2)… On voit bien que si le déchet est, dans le premier cas, présenté comme toxique, le reste est source féconde de vie. Cela nous pousse à nous interroger sur ce qu’est un déchet. Les déchets n’existent pas dans la nature. Les relations entre les êtres vivants et leur milieu sont si bien organisées que les excrétions d’une espèce deviennent nourriture pour une autre. En fait, un déchet c’est tout simplement « quelque chose qui n’est pas à la bonne place » et donc qui altère notre relation à la Création comme le péché fausse notre relation à Dieu. Déchet/Péché deux mots qui sonnent pareillement et qui sont indissociables de notre condition humaine. Quoi que nous fassions nous produisons des déchets, l’important est d’en prendre conscience et de reconnaître que nous ne pourrons pas gérer seuls (par la technologie) cette question. C’est de cette confession que nous tirerons les moyens de mettre en œuvre la conversion de nos modes de consommation qui seule pourra éviter le pillage et l’empoisonnement de notre planète.

Le groupe au moment du repas © Christian Lacroix

 

Christian Lacroix

(1)Deutéronome 23.13-14
(2)Jean 6.12-13

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