C'est quoi

L’interconvictionnel ?

01 février 2019

Un questionnement existentiel

Quand on questionne des personnes sur la spiritualité, on constate qu’elles n’en donnent pas une définition unique. La spiritualité est souvent entendue d’abord comme de l’ordre du religieux, mais ne s’y cantonne pas.

Elle concerne aussi la relation personnelle à une transcendance, qui dépasse notre être. Dans tous les cas, elle s’ancre dans l’humanité, habite l’humanité et les relations humaines. Elle constitue une dimension de l’être humain qui l’anime et l’oriente vers un comportement vertueux. Elle est aussi un questionnement existentiel dans une recherche de sens ultime de la vie.
L’imagination collective, qui produit les mythes, textes sacrés, grands récits… n’est aujourd’hui plus réservée aux religieux ni même aux artistes et publicitaires. Les gens les plus ordinaires s’en sont emparé pour décoder le monde et leur propre vie
 
Oratoire à l’archevêché de Bourges © Élisabeth Renaud

Cette démocratisation de l’imagination s’est traduite par le développement d’une spiritualité laïque. Certains parlent d’une spiritualité du soi, qui emprunte au bouddhisme. Corps et esprit se sont interpénétrés dans un soi transcendant-immanent, c’est-à-dire à la fois hors et en notre être.
D’autres se donnent pour objectif d’accompagner les personnes vers une plénitude de vie.

Une spiritualité partagée

Le philosophe Luc Ferry opte pour un humanisme de l’Homme-Dieu qui relie les êtres humains entre eux, dans des valeurs pour lesquelles on peut risquer sa vie. La mort d’autrui, épreuve du non-sens, est surmontée par cette humanité divinisée, une absolutisation de l’humanité. Cette pure immanence est ce que revendique aussi, d’une autre façon, le philosophe athée André Comte-Sponville. Cette spiritualité ouvre au monde, aux autres, au Tout qui nous englobe.
Assurément, la spiritualité concerne même les non-croyants. Par conséquent, le croyant se doit de renoncer à s’approprier le spirituel, et de le partager avec les non-croyants. Cette reconnaissance de la spiritualité chez l’autre non-croyant est une démarche d’humilité qui pourrait amorcer une reconnaissance mutuelle, préalable à la fin du rejet de la religion.
Cette humilité consiste à ne pas considérer sa spiritualité comme l’unique ou la seule vraie, et d’engager un dialogue inter-spirituel avec l’autre, interconvictionnel dit-on plutôt aujourd’hui.
 
Le dieu Thor de la mythologie nordique affrontant les géants, M. E. Winge, 1872 © https://commons.wikimedia.org

L’interconvictionnel élargit davantage l’espace de la reconnaissance à ceux qui ne revendiquent qu’une matérialité de l’existence. Ils sont peu nombreux, mais pourquoi ne les inclurait-on pas ?

Bertrand Marchand

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