Billet d'humeur (Le texte est publié sous la responsabilité de son auteur)

La loi du hasard

01 septembre 2017

Depuis la loi Faure de 1968, il n’existe plus de sélection pour entrer à l’université. Une seule condition était requise : l’obtention du baccalauréat... jusqu’à cette année. Aujourd’hui, les universités ne peuvent plus accueillir tous les étudiants. Des mesures drastiques ont été prises basées sur la seule loi du hasard : le tirage au sort.

La volonté de démocratiser l’accès à l’enseignement supérieur a entraîné une constante augmentation du taux de réussite à l’épreuve terminale du cycle secondaire : 75 % en 1995 contre 88 % en 2016. On se souvient de la déclaration en 1986 de Jack Lang, ministre de l’Éducation nationale, 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat. Une ligne politique qui allait entraîner la création d’un bac professionnel et la dépréciation du travail manuel et pratique. Pourtant, depuis quelques années, les pouvoirs publics tentent de réhabiliter les filières courtes conduisant aux métiers de l’artisanat, mais en vain.

Le système D

Aujourd’hui, cet élargissement de l’accès à l’enseignement supérieur pose problème. Les amphithéâtres bondés ne peuvent plus accueillir tous les étudiants. Une solution a été mise en place depuis quelques années avec la retransmission des cours en vidéoconférence dans des amphis répartis aux quatre coins des villes. Mais aujourd’hui, ce système D ne suffit plus.

 
© Élisabeth Renaud

On avait déjà entendu parler du tirage au sort qui se pratique en Belgique, au Luxembourg, pour les étudiants français désirant faire des études de médecine, dentaire, vétérinaire, kinésithérapie, orthophonie… La méthode interpelle, voire révolte. Et voilà que cette année, cette réalité a fait la une des journaux au printemps. La France s’en est remis au hasard pour recruter ses étudiants. Un numerus clausus a été instauré avec sélection par tirage au sort dans trois filières, en plus des formations de sport qui l’ont déjà pratiqué pour la rentrée 2016.

Les valeurs de l’humain

Dans ce contexte d’un avenir basé uniquement sur l’aléatoire, comment motiver les futures générations ? Comment, dans une société fondée sur le hasard, un étudiant peut-il se sentir attendu, utile ? L’Évangile nous dit que chaque être humain a des aptitudes et des qualités. En tant que chrétiens, un tel tirage au sort peut-il faire partie de nos valeurs ? Dans la parabole des talents, chacun est félicité en fonction de son travail, voire de ses mérites. On est loin du tirage au sort.

Alors quelle solution ? Une sélection sur dossier ? Comme c’est le cas pour entrer dans un Institut universitaire de technologie (IUT) ou les universités ayant le statut de Grand établissement, telle Paris-Dauphine qui sélectionne depuis plusieurs années ses étudiants sur dossier. Ou bien une sélection sur des prérequis, autrement dit des « acquis minimaux », comme le préconise le nouveau président de la République, ou encore sur examen ? Réponse, peut-être, à la rentrée 2018.

 

 

Les faits

En avril dernier, le gouvernement Cazeneuve entérine l’usage du tirage au sort pour les élèves souhaitant s’inscrire en médecine, psychologie et droit, en sus des filières de sport. Cette solution aléatoire, mais non discriminante, a été unanimement dénoncée. Une pétition a notamment recueilli plusieurs milliers de signatures. Même le secrétaire d’état à l’enseignement supérieur alors en poste, Thierry Mandon, parlait du plus bête des systèmes en janvier dernier. Pourtant, c’est bien lui qui décidera quelque mois plus tard du mode d’accès à ces cursus. La nouvelle ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, a très vite affirmé, le 29 mai, sa volonté de mettre fin à ce dispositif injuste dès la rentrée 2018. 

 

 

Élisabeth Renaud

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