DVD

Sami – Une jeunesse en Laponie

01 octobre 2019

Sami - une jeunesse en Laponie, un film de Amanda Kernell. 1h50. Avec un dossier pédagogique. Prix Jean Renoir des Lycéens 2018-2019.

 

Voici un film simple et beau, qui serait adapté, par exemple dans un groupe de jeunes, pour mener une réflexion sur l’identité, le rapport à la tradition familiale, le racisme, et l’histoire de cette Europe du Nord, protestante, que nous connaissons peu.

Répartis sur les territoires nord de la Suède, la Finlande, la Norvège et la Russie, les Samis étaient traditionnellement des semi-nomades, souvent éleveurs de rennes, vivant dans des conditions extrêmes. Appelés « Lapons » - les « gueux », c’est tout dire -, ils avaient été évangélisés de façon dure par les Églises protestantes. Et puis il fallait les éduquer, mais dans leur région et en fonction de ce qu’on pensait être leur niveau d’intelligence ! Car il n’était pas question qu’ils se mêlent aux bons sujets.

Elle-Marja, une jeune Sami qui sort de l’enfance (dans les années 1930), se distingue par son intelligence, son entêtement et sa fascination pour la culture suédoise majoritaire… qui considère les Samis comme inférieurs. De nombreux chercheurs, à l’époque, continuaient à mesurer la civilisation des groupes humains à la longueur de leur nez ou à la largeur de leurs hanches. Pitoyable scène, où ces messieurs d’Uppsala sont solennellement reçus dans la petite école, venus avec leur appareil photo pour graver l’anatomie des jeunes filles samis. Humiliation, mépris des consciences… Le film reste pudique, mais la séance est traumatisante pour les adolescentes, et Elle-Marja en particulier.

Dès lors, marquée dans sa chair et son esprit, elle tente par tous les moyens de s’insérer dans une société suédoise policée où chacun se montrera courtois, souriant ou glacial. Pas un mot n’est prononcé plus haut que l’autre, mais la frontière à ne pas dépasser est palpable en permanence. La réalisatrice, d’origine sami, nous donne accès aux sentiments de la jeune fille, dont le visage est volontaire et magnifique. Mais ce sont aussi ses silences, ses transgressions, ainsi que la rupture culturelle tragique que représente toute sa vie, qui nous renvoient aux absurdités de ces temps.

Séverine Daudé

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