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Edito

Du bonnet d’âne à TikTok

01 mars 2024

Aussi ancienne que l’humanité, et largement présente dans la Bible, la violence s’appuie sur des ressorts psychosociologiques, telle la volonté de domination, pour acquérir le pouvoir ou le bien d’autrui, la frustration et l’humiliation, ou le désir de vengeance.

Pour une vision globale du sujet, on peut distinguer trois catégories. Des formes traditionnelles : menace, rixe, torture, terrorisme, guerre. Des formes institutionnelles, ou systémiques, où aucune force ne semble utilisée (une violence sans violence), mais qui génèrent dans les « minorités » le sentiment de n’avoir aucune place dans la société et provoquent des révoltes en réaction à l’humiliation subie. Et enfin des formes nouvelles, non par leurs fondements ou leurs conséquences, mais plutôt par les moyens avec lesquels elles s’expriment et l’usage qu’on en fait, tels les réseaux sociaux, et aussi les perspectives créées par l’intelligence artificielle ou les armes biologiques, chimiques, nucléaires.

La violence fait peur, et en même temps elle fascine. Qui n’a jamais été captivé par des images de violence diffusées sur les médias et les réseaux sociaux, alors que nous serions sans doute davantage effrayés et même traumatisés par leur spectacle réel ? Pourtant, le ressenti n’est pas uniforme : ce qui était considéré autrefois comme normal, tel le châtiment corporel d’un enfant, est devenu inadmissible aujourd’hui en Occident. L’école est un bon exemple de cette évolution. Jusque dans les années 1950, châtiment et humiliation étaient des outils pédagogiques : la trique et le bonnet d’âne avaient même vertu que le tableau noir, permettant au maître d’asseoir son autorité par la peur et le rire à l’encontre du mauvais élève.

Heureusement ces procédés n’ont plus cours aujourd'hui. Mais la violence n’a pas disparu, elle a juste évolué. Grâce aux technologies modernes les élèves ont acquis un pouvoir de nuisance – pression, intimidation, harcèlement, vengeance – tant sur leurs camarades que sur les enseignants. Nous sommes maintenant dans une inversion des rapports entre enfants et adultes en milieu scolaire : des élèves peuvent nuire gravement à d’autres élèves et aux professeurs avec quelques photos sur leur Smartphone et quelques clics sur TikTok… Malheureusement la régulation de ces outils se heurte à des conflits de valeurs entre liberté d’expression et censure morale, et à l'opposition de groupes de pression et d’intérêts commerciaux. La bonne réponse reste encore à inventer.

 

Sommaire N°193 - Mars 2024

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Jean Charpiot

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